Un Chantier de Terre et Paille dans le Gers : des cloisons en murs banchés
Lieu
Gîte le Grangé sur le chemin de Compostelle, Gers, Sud-Ouest de la France, tenu par le couple Andreas et Lilie Flemming depuis 2009.
Rendez-vous
Dernier week-end du mois d’août 2015, les samedi et dimanche 29 et 30.
Chefs de chantier
Andreas Fleming et Aurélie (Dame Lilie). Andreas nous forme et surveille notre travail de banchage. Lilie nous reçoit en sa maison et nous assiste sur le chantier.
Besoins
Il s’agit de finir les cloisons intérieures d’une petite maison traditionnelle gersoise en torchis.
Il faut monter les murs banchés, entre deux planches de coffrage, dans la cloison de séparation entre une chambre et la salle de séjour.

Matériaux
- Argile extraite sur place au tractopelle, dans le jardin, car il faut creuser au-dessous de la surface de 35 cm, qui peut contenir des graines, des racines, des débris.
- Paille en bottes achetées à un cultivateur voisin.
- Eau.
- Planches de coffrage pour les banches.

Outils
- Poubelle pour mélanger la terre et l’eau de la barbotine.
- Brouette ou grande baignoire pour malaxer la paille et la terre.
- Palettes de stockage.
- Bâches pour éviter le dessèchement de la paille préparée avec la barbotine.
- 2 Seaux par personne, un pour la barbotine, l’autre pour la paille préparée, qui sera replongée dans la barbotine pour bien s’agglomérer dans les murs banchés.
- Un mélangeur électrique pour faire la barbotine.
- Une scie circulaire sur support fixe pour couper les planches de coffrage, les tasseaux intérieurs, qui assurent l’armature des cloisons entre les montants en bois et les masses en bois permettant de tasser le matériau dans les banches.
- Une visseuse-dévisseuse pour fixer les planches et les démonter au fur et à mesure que les murs s’élèvent.
- Des vis.

Tenue de travail
- Des gants solides pour éviter de se blesser avec des brins de paille, qui peuvent provoquer des micro-coupures.
- Des vêtements non fragiles.
- Bandeau pour tenir les cheveux.
Ma fille et moi avons opté pour un short et un débardeur. J’étais pied nu le matin, en ballerine l’après-midi. Les filles de la veille, Marjorie et Ana, avaient des pantalons joliment décorés le soir, elles auraient voulu les faire qu’elles n’auraient pas si bien réussi leurs dessins.

Il est plus facile d’enlever la boue sur la peau que sur du tissu, surtout quand il fait chaud, avec un seau ou au jet d’eau, avant de passer à la douche. La terre est bonne pour la peau, elle n’agresse pas comme le ciment ou la chaux.
Pour les vêtements terreux, il faut bien les laisser sécher avant de les frotter au scotch brite sec ou de les brosser, avant de les laver (conseil perso). Sinon la boue s’étale et s’incruste au lieu de s’enlever.

Équipe
Stéphane (de Toulouse) a commencé le samedi matin, à 11 heures, avec Marjorie (de Toulouse) et Ana, les deux filles sont reparties le samedi soir. Stéphane a fait les deux jours.
Isis et Ulla (de Hambourg) ont géré l’intendance de la maison pendant que Lilie était sur le chantier.
La nièce de Andreas, débarquée la veille de Hambourg, s’est occupée des enfants du couple toute la journée du samedi et de mon petit-fils Imran en plus le dimanche.
Ma fille Coralie et moi sommes arrivées le samedi soir et avons attaqué le chantier le dimanche matin. J’ai travaillé deux séquences de deux heures.
Le midi du dimanche, Nathalie et Nicolas sont arrivés de Toulouse. Nathalie a continué mon mur. Stephane en a fini un autre.
Travaux préalables
Une ossature Bois a été construite préalablement, pour structurer les cloisons des pièces de la petite maison : une pièce à vivre avec cuisine, deux chambres, une salle d’eau.
Les circuits électriques ont été posés. Les fils seront intégrés dans les murs banchés. Les tuyaux d’arrivée d’eau sont organisés.
Préparations
- Barbotine Dans une grande poubelle, on mélange de la terre avec de l’eau jusqu’à consistance d’une pâte à crêpes très liquide. Un malaxeur à été utilisé par Andreas.
- Paille La paille à été préparée la veille, mélangée à la barbotine, poignée par poignée dans la brouette.
La préparation est stockée sur une palette, bâchée pour éviter le dessèchement. Il fait très chaud en cette fin de mois d’août 2015 dans le Gers.
Voir photos du chantier le dimanche matin avant le début du travail.
Lilie refait quelques seaux pour finir le chantier du soir.
Technique
Murs banchés : Un béton de paille et terre est monté entre deux planches de coffrage, bien pressé dans les angles autour des pièces de bois qui font l’armature de la cloison et l’encadrement de la porte, avec l’insertion des circuits électriques.

Mise en œuvre de la terre et de la paille

Notre travail consiste à remplir les espaces entre les deux planches et à bien les tasser au tasseau de bois contre les montants en bois. Andreas nous fait une démonstration et c’est parti !

Voir l’album de la Technique de Paille et Terre montrée par Andreas
Finitions L’après-midi du dimanche j’ai fait une session de finitions de deux cloisons réalisées au cours du mois de juillet. Les briques de paille montées à la terre, se rétractent en séchant. Il peut rester entre elles des interstices préjudiciables à la bonne isolation, en particulier phonique, entre les pièces. Mon travail consistait à remettre de la paille trempée dans la barbotine pour combler les vides, en poussant l’agglomérat au plus profond avec une spatule de vitrier et à lisser l’ensemble.
Enduit de lissage
Une couche d’enduit final sera fait à la terre pour lisser l’ensemble, les brins de paille émergeant servant de couche d’accroche.
Mes Rendements
Le matin J’ai fait une brique et demi en deux heures, en huit seaux de paille préparée et deux seaux de barbotine. J’ai trouvé ça long.
Le matériau est agréable à travailler, de plus il n’est pas toxique, ni irritant comme la chaux, mais il nécessite de la main-d’œuvre et de la patience, beaucoup de patience.
L’après-midi Pour éviter de me fatiguer et de créer des tensions dans le dos, j’ai préféré changer d’activité. J’ai fait les finitions de deux murs, jusqu’à ma hauteur. Là je voyais tout de suite le résultat de mon travail de bouchage des vides, et c’était plus gratifiant.
Mon sentiment
Un ami artisan électricien m’avait dit en voyant mes chantiers de chaux et chanvre à Kerantorec que c’était un chantier sale, un qui nécessite beaucoup plus de nettoyages de finitions de chantier qu’un chantier d’électricité ou de plomberie ou de menuiserie. Il avait raison. Le chantier de paille et terre est un chantier de patouille, genre de ce qu’on pourrait faire en maternelle, si on avait le droit de se salir et de construire des choses pour de vrai.
Avantages
La paille et la terre offrent un très beau matériau fini, on a un sentiment de naturel, de beauté, de confort. L’hygrométrie doit être parfaitement régulée, les performances thermique et phonique doivent équivaloir ceux que je connais avec la chaux et le chanvre.
C’est une technique peu coûteuse, si on a les matériaux près de chez soi. De plus tout est recyclable (sauf les vis des coffrages, mais elles serviront pour d’autres chantiers).
Mais je suis pas sûre que je le ferais chez moi, c’est trop long de voir les murs se monter, brique par brique, quasiment.
Le matériau doit être très sain dans une région où le climat est clément, ensoleillé, chaud. Dans ma Bretagne en bord de mer, je serai moins sûre de ce choix. Ou alors j’ajouterais du sable de rivière à la barbotine.
Chez moi, par contre, je me vois bien appliquer la technique de ces murs banchés pour construire des cloisons, en utilisant mes matériaux habituels de chanvre, chaux et sable, ce que je sais pouvoir mettre en œuvre moi-même dans ma bétonnière, sans tout faire à la main comme nous l’avons fait ce week-end.
Ambiance
C’est un travail à faire entre amis, entre amis solides, de bonne volonté.
Chez Andreas et Lilie, l’ambiance était excellente. Nous étions tous heureux d’être là, sans prise de tête, juste des prises en main, avec des discussions sympathiques au cours des repas, en vrais échanges locaux et européens. Le cadre est merveilleux, sur le chemin de Compostelle, dans une belle terre de Gascogne, retrouvée pour moi cinquante ans après le choc de l’été 65 (voir mon ebook Le Vent d’Avezan, dont je prépare une deuxième édition augmentée de nouveaux documents, eux aussi récemment retrouvés dans mes archives).
J’ai aimé remettre la main à la pâte avec des matériaux fondamentaux, la terre, l’eau, et leur produit, le blé, dont il reste la paille après récolte.
Une belle histoire.
Documentation
http://terrepaille.fr/avantages
Gaelle Kermen © 2015